Il y a une véritable guerre qui se déroule sous nos yeux en ce moment, sans que personne n’en parle. C’est la guerre pour avoir notre attention. L’attention, c’est la devise qui vaut le plus cher.
Et pourquoi?
Car lorsqu’on donne attention à quelque chose, on la nourrit.
Les médias ne disent pas nécessairement quoi penser, mais sur quoi : ils dirigent notre attention là vers où ils veulent qu’on regarde. Et ils nous convainquent aussi que nous n’avons aucun poids dans la balance. Ils cultivent l’impuissance. Ils exacerbent la séparation entre nations, peuples et individus, en nourrissant la peur, la panique, l’état de crise.
Tantôt c’est une guerre, tantôt une menace, un conflit commercial, une maladie, une famine, une catastrophe, un cataclysme, une urgence planétaire, une ultime urgence planétaire, un paroxysme d’urgences planétaires.
«Le monde va mal. Comment ça, tu n’es pas au courant?» On se fait même un point d’honneur de le répéter aux autres.
Il ne s’agit pas de nier ce qui existe, de faire semblant que tout va bien, mais de décider ce qu’on nourrit. Parce que l’attention est aussi notre plus grand pouvoir. Et oui, voilà pourquoi payer le gros prix : pour la diriger. Parce que tout ce qu’on nourrit, grandit.
Avant l’avènement des médias, depuis des siècles, la religion nous induisait à penser qu’en tant qu’individus, nous ne pouvions pas accéder à la vérité, nous n’en étions ni dignes ni capables — ça prenait un intermédiaire. Quelqu’un d’autre qui nous disait ce qui était vrai.
C’était une façon de nous couper de notre sagesse innée, à laquelle chaque être humain a accès.
C’est ainsi qu’aujourd’hui nous perpétuons cette croyance d’impuissance en gobant sans défense les informations que nous recevons — et bizarrement, la peur semble plus appétissante que le discernement.
Les médias nous amènent à regarder loin de nous-mêmes. Loin des manifestations d’amour qui existent pourtant et en immenses quantités, dans les petites et grandes choses de la vie, à tout moment, dans tous les coins du monde.
La prochaine fois que vous régurgitez une peur venue de l’extérieur, songez à ceci : à qui donnez-vous votre pouvoir en ce moment?
Il faut revenir à l’essence : notre monde idéal est-il fait de peur, clivage, cynisme, ou de compassion, de beauté humaine?Contre un monde «qui va mal», c’est le temps de rapatrier ce pouvoir.
Cela ne plaira pas à tout le monde, et surtout aux personnes qui ont besoin de continuer de cultiver cette peur — car la misère aime la compagnie.
Incarnons les changements qu’on veut voir dans le monde, comme nous invitait à le faire Gandhi : dans la vie de tous les jours, dans nos discours, sur les réseaux sociaux, auprès de nos enfants, de nos ami·es, de nos voisin·es. Parlons avec conscience.
Derrière les couches d’angoisse, dans notre sagesse innée on a accès déjà à ce monde plus serein, fait de bonté et d’amour, de volonté d’aider, d’accueil, curiosité, paix, liberté. De calme, d’équilibre. D’accomplissement de nos plus profonds désirs, de joie. De magnificence humaine.
Ce monde qu’on veut voir se manifester existe en nous. Et chez tout le monde.
Peu importe la culture, l’ethnie, la langue, l’endroit d’où l’on vient : chaque personne a ce souhait au fond du cœur. Si vous ne le croyez pas, demandez aux enfants…
C’est le temps de retourner à nous-mêmes. C’est le temps de reconnecter avec notre immense pouvoir, de porter notre attention avec conscience sur ce qu’on veut nourrir. Et de décider quel monde nous voulons avoir aujourd’hui.
Non pas demain: aujourd’hui.
Plein d’amour,
Camilla
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Ce texte a été publié par le journal Le Devoir, le 5 mars 2025. Lien ici.
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